Dossier
Les douleurs, territoires corporels du sujet cancéreux
Vécu psychique et douleur dans le cancer
The Pain, Territories of the Cancer Patient
Psychic Experience and Pain in Cancer
1
Consultation douleur chronique, groupement hospitalier de l’Artois, centre hospitalier de Lens, 99, route de la Bassée, F-62300 Lens, France
2
Consultation douleur et rhumatologie, clinique de rhumatologie, CHU de Lille, boulevard Laine, F-59000 Lille, France
* e-mail : s.tiblac@gmail.com
** e-mail : vbarfety@gmail.com
Reçu :
6
Janvier
2019
Accepté :
23
Janvier
2019
La survenue de la maladie du cancer vient déséquilibrer le sujet, de par le potentiel morbide dont elle est chargée, et affecter son corps par les atteintes douloureuses qui vont l’accompagner. Les conséquences sur l’économie psychique du sujet sont nombreuses. Être douloureux lorsque l’on a un cancer, c’est être irrémédiablement ramené à l’organe malade et au cancer. Mais c’est aussi être focalisé sur son corps réel sans possibilité de s’en dégager. Il s’en suit une préoccupation en lien avec la douleur, avec la maladie et enfin avec des mouvements hypocondriaques tant l’impossibilité de penser à autre chose est présente. Ainsi, la douleur sera porteuse d’émotions liées à la douleur, à la maladie grave, au pronostic. Paradoxalement à ce qui peut être attendu et imaginé chez les patients, l’après-cancer, c’està- dire la phase de rémission, donne lieu à une somation de plaintes douloureuses dotée d’une grande détresse chez le sujet. En effet, cette période tant attendue est malgré tout appréhendée de façon ambivalente, puisqu’elle s’accompagne souvent d’angoisse diffuse et de douleurs résiduelles ou séquellaires des traitements. De cette expérience intense associée à la découverte du cancer, la douleur restera le curseur à disposition du sujet pour contrôler le possible retour de la maladie. Elle aura aussi pour effet de colorer le vécu ultérieur d’autres douleurs qui seront alors ramenées à cette douleur inaugurale doublement traumatique.
Abstract
The onset of cancer disease unbalances the subject because of the morbid potential it is charged with and affects his body with the painful disorders that will accompany it. The consequences on the psychic economy of the subject are numerous. To be painful when you have cancer is to be irreparably brought back to the sick organ and to cancer and focused on your real body without the possibility of freeing yourself from it. This leads to a concern related to pain, but also to disease and finally to hypochondriac movements as the impossibility of thinking about something else is present. Thus, pain will carry emotions related to pain, serious illness, and prognosis. Paradoxically, what can be expected and imagined in patients, the post-cancer phase, i.e. the remission phase, gives rise to a somation of painful complaints with great distress in the subject. Indeed, this longawaited period is nevertheless approached in an ambivalent way since it is often accompanied by diffuse anxiety and residual or after-effects pain from the treatments. From this intense experience associated with the discovery of cancer, pain will remain the subject’s cursor to control the possible return of the disease. It will also have the effect of colouring the subsequent experience of other pains, which will then be reduced to this doubly traumatic inaugural pain.
Mots clés : Douleur / Cancer / Psychologie
Key words: Pain / Cancer / Psychology
© Lavoisier SAS 2019